Le travail social ne relève pas des disciplines académiques, aussi la possibilité de prolonger une formation dans ce domaine par la soutenance d’une thèse, en dépit de quelques tentatives, reste-t-elle un objectif inatteignable. Le chemin sera d’autant plus long que l’intégration des formations en travail social dans les cursus universitaires est loin de faire l’objet d’un accord entre les organisations professionnelles. Cela n’empêche pas quelques thèses, soutenues dans des disciplines comme les sciences politiques, la sociologie, les sciences de l’éducation ou la psychologie, voire l’histoire, de traiter de sujets qui concernent les pratiques professionnelles du travail social. C’est ce que fait Céline Rothé, dont la thèse sur le travail des équipes de prévention et des services d’accueil d’urgence montre comment des travailleurs sociaux réinventent, à la marge de leurs institutions, une accroche et un suivi de jeunes à la rue. C’est aussi le cas d’Élisa Chelle qui, comparant la mise en œuvre du RSA en France et d’une prestation assez voisine à New York, démontre que ces mesures, qui visent à promouvoir des modifications de comportements par des incitations, génèrent surtout de nouvelles formes de pratiques professionnelles et des transformations de la gestion des services sociaux. Ces thèses ont souvent l’intérêt de regarder en dehors de la France, et viennent compenser la faiblesse de l’ancrage théorique européen du travail social. Alors que les masters valorisent les stages longs à l’étranger, les formations en travail social restent très frileuses dans ces échanges et privilégient plutôt les voyages d’étude d’une semaine qui, conjuguant visites d’institutions et tourisme, procurent plus d’aimables souvenirs qu’ils ne favorisent l’acquisition de compétences et de regards différents. Pour celles et ceux qui voudraient rompre avec ce repli hexagonal, signalons la parution du premier numéro de « Critical and Radical Social Work », une nouvelle revue de l’Université de Bristol (http://www.policypress.co.uk).